Deux jours qu'il est parti. Sans rien dire, sans rien leur dire. C'est ce qui est le plus difficile ; ne pas pouvoir leur dire quand leur père rentrera...
Quand cela a-t-il commencé?
Une accumulation de choses ont concourru à cet état. Je situe cela plus ou moins en 2007 : contrôle fiscal, baisse d'activité, sa focalisation sur son business et les enfants. La dernière surtout. Il passait ses soirées avec elle, pour l'endormir. Et moi je restais seule. Je lui ai maintes fois signalé, mais il ne voulait pas entendre. Ses soeurs lui ont dit aussi...
Nos relations sexuelles se sont espacées. A cause de cela, à cause de tout. De moi aussi certainement, ne travaillant pas à l'extérieur, je me suis certainement négligée comme le font nombre de femmes au foyer.
Sur ce cancer de la prostate. Opération avec succés médical, sa vie n'est plus en danger. Restent les problèmes de fonctionnement. La rééductation fut longue, douloureuse sur le plan psychologique. Assumer son impuissance, une énurésie...rien de moins simple pour lui.
Et nous? Ben je ne sais plus. Je me rapelle que je pleurais très souvent la nuit. Avant son opération, j'avais fait le constat d'une relation tous les 6 mois.... Après l'opération réussie du cancer, comment lui reprocher ce pour quoi il ne pouvait rien ? Bien sûr cela ne l'empêchait pas de me regarder mais je me sentais transparente...Je voyais ma vie de femme défintivement entérée et je ne pouvais pas m'y résoudre. J'ai commencé à me remettre en question : moi, mon mariage, ce en quoi je croyais...Comment fonctionner désormais parce que je me sentais très seule...
Bien sûr, j'ai suivi les divers aléas médicaux : ses interrogations sur notre vie de couple, les réponses que la médecine pouvait y apporter, viagra et autres. Rien n'était concluant, même une fois les problèmes d'énurésie réglés...
Tout ceci a pris 3 ans, trois années de tâtonnements, de raisonnements, de pleurs sans relations sexuelles ou presque...jusqu'à ce que...
Prendre un amant. Le gros mot est lâché. Un amant...Où? comment? Etait-ce la solution ? Je suis femme avant d'être une femme et le sexe a toujours été important pour moi, le fondement du couple...Faire sans? ma vie entière? Divorcer? Et les enfants! N'était-ce pas complètement égoÏste de divorcer pour une question à priori "futile". Je dis bien à priori... je pensais que non, bien sûr que la solution n'est pas forcément celle de tout le monde mais cela m'a semblé moins égoïste pour mes enfants. Je pensais que je pourrais...que cela me permettrait de supporter cette frustration. Choisir dans mes relations ? Impossible bien sûr ... alors j'ai surfé...et les solutions sont venues toutes seules aussi plétoriques que possible...
Lui, il pense que je "saute" sur tout ce qui bouge"...puisqu'il l'a découvert. Je sais que celui lui a fait très mal, qu'il a souffert, qu'il souffre sans doute encore, Cela lui donnait-il le droit d'écrire ce qu'il a écrit aux enfants? A-t-il le droit de se poser en censeur? En juge ? Celui de mari outragé? Et mes droits à moi, qu'en fait-il?
Oui, il a fait des efforts, mais moi aussi ! J'ai surmonté ce que j'imagine est difficilement supportable pour beaucoup mais ce sont des détails intimes de nos relations sexuelles qui n'ont pas forcément intérêt à être raconté... A un moment, nous avons aussi évoqué les sex-toy. J'y ai cru. Vraiment et de toutes mes forces. Cela c'est révélé frustrant quand il n'y a plus que ça... J'appréciais quand il me caressait mais encore. Elles ont bien changé aussi ses caresses....Par rapport à ces détails difficiles qui sont restés gravés dans ma mémoire, il m'est difficile de le toucher, difficile d'être juste tendre... Du coup, il est devenu plus irritable, son humeur est communicative, à moins que ce ne soit la mienne qui ait donné le "la"...Aujourd'hui, nous dormons au même endroit. Et c'est tout. Je sais que cela ne lui convient pas mais je n'arrive plus du tout à faire semblant depuis quelques mois.
Parler, nous parler est devenu difficile. Parce que nous sommes différents et que pendant presque des années,nous avons vécu côte-à-côte sans beaucoup nous parler. Le temps passé ne peut se rattraper, je l'ai appris. On peut essayer de faire des efforts mais le dialogue est difficile à reprendre.. J'aurais pu, j'aurais dû...facile à dire!!!! Nous nous sommes éloignés..
Dialoguer? Comment dialoguer avec quelqu'un qui n'accepte même pas que je puisse, parfois, m'exprimer avec passion sur certains sujets ; oui, je donne l'impression que je m'emporte! Et alors? Certains sujets me font bondir! Faut-il que je m'exprime sur un ton neutre et mesuré? Pourquoi faire? respecter les bonnes moeurs? Parce que cela ne se fait pas ?
Oui j'ai des idées différentes des siennes ; je crois qu'il y a de la vie ailleurs que sur Terre, quelque part dans l'Univers, je ne crois pas en Dieu, j'exècre la religion, pas ceux qui ont la foi..Je suis donc forcément la méchante, lui l'homme sage qui possède les bonnes valeurs... D'ailleurs, ne pose-t-il pas en juge suprême du reste de notre vie "je me laisse encore quelques...de réflexions....cela pourrait influer mes choix"!!!!!
Il y a un an il a écrit une lettre aux enfants que j'ai trouvé inacceptable ; inacceptable qu'il essaie d'altérer mon statut de mère auprès des enfants..Quel appui rechercher ? Ma famille? Ma mère n'a rien trouvé de mieux à dire "qu'as-tu fait", mon père souhaitait entendre les deux parties pour "juger"!!
MERDE!!!! Je n'attends pas d'eux d'être jugée, je souhaite un appui sine qua none!!!! Et je l'ai reçu de la part de mes belle-filles, l'une m'a appelé pour me dire qu'elle "savait certaines choses, qu'elle ne voulait pas juger, qu'elle m'aimait , que j'étais une belle-mère formidable, qu'elle ne voulait pas que je reste pour les enfants parce qu'elle avait vécu cela et que c'était insupportable, que bien qu'elle aimait son père, elle savait à quel point il était difficile à vivre....". Quant à l'autre, mes relations sont devenues aussi beaucoup plus complice avec elle...
Un an a donc passé...la dernière conversation de "mise au point" lui a fait avouer que non, il n'était plus amoureux de moi, que de toute façon faire l'amour avec moi était complètement vide de sens dans la mesure où je me montrais passive, et que, bon, il avait une jolie femme, et c'est tout. Que son intérêt était de préserver les enfants en évitant qu'ils aient une mauvaise idée du mariage....Il est vrai qu'ils ont tout deux déclaré qu'ils ne voulaient pas se marier... Qu'il fallait que je dise comment j'envisageais les choses. Ce que je voulais et comment je le voulais...
Comment je le voulais...En fait quelques temps après cette conversation, il est simplement apparu que je ne changerais rien à ma vie, du moins officiellement. Je reste l'épouse, et à défaut d'être la parfaite épouse, j'apparais être la parfaite maîtresse de maison au moins aux yeux de nos hôtes puisque j'aime recevoir et que j'accompagne mon époux dans ces différentes obligations sociales et relationnelles. Oui je suis un peu distante, mais je l'ai toujours été ; d'abord par timidité ou plutôt par réserve car je n'impose pas mes vues ou mes opinions, aujourd'hui parce que je n'en vois pas l'intérêt sauf quand la conversation me passionne ou m'irrite au plus haut point. Je mène désormais une vie plus parallèle que jamais : l'expérience aidant mes deux vies sont pratiquement hermètiques l'une à l'autre même s'il me plait à les faire s'imbriquer, se confondre parfois même. C'est un jeu intéressant que l'on mène à deux, ce qui rend le jeu d'autant plus subtile et jouissif. Parce que nous sommes deux et que cela change tout.
J'ai beau penser que la vie de couple est une hérèsie je n'en pense pas moins que la communion avec un être que l'on a choisi, élu, qu'importe le terme retenu, cette communion donc sur le plan amoureux est une chance. Partager avec lui des moments intenses, rares certes, mais d'autant plus précieux... Entendre sa voix ou juste penser à lui me suffirait presque, j'ai bien dit, presque. Nous savons trop bien le prix de notre soi-disant liberté pour nous permettre de rompre ce lien qui nous éloigne. Un faux-pas et ce serait la guerre, nous nous perdrions dans la bataille ! Et qu'y gagner ? Que de fois je me suis posée la question si un jour j'étais à nouveau "libre". Je sais que la tentation est grande, mais non, la liberté et surtout la liberté d'aimer me l'impose, plus jamais vivre à deux ! Partager des moments avec l'autre, de longues périodes pourquoi pas, mais avoir le choix, toujours, de partir ou d'être seule....